Dans une tribune publiée le 29 décembre dernier, le sénateur Matata Ponyo, est revenu sur la remise en cause de l’arrêt de la Cour de constitutionnelle sur son procès dans l’affaire Bukaga Lonzo par le Sénat et le Parquet Prés cette Haute cour.

Il estime que cela affecte les perspectives d’un État de droit tel que voulu par le Chef de l’Etat Félix Tshisekedi.

L’ancien premier ministre affirme que jamais les hautes juridictions judiciaires du pays n’ont été mises à dure épreuve comme dans le dossier Bukanga Lonzo.

« Loin d’être un dossier judiciaire, il apparait au grand jour qu’il s’agit plutôt d’un dossier foncièrement politique. Sinon, comment peut-on imaginer qu’un arrêt rendu par la Cour constitutionnelle, la plus haute juridiction du pays, puisse être contesté par l’organe judiciaire chargé de son application, à savoir le Parquet général près la Cour ? », s’interroge Matata Ponyo qui souligne que loi organisant le fonctionnement de cette Cour stipule « que les Arrêts sont immédiatement exécutoires ».

« Le Procureur général a récupéré le dossier de force directement du greffe de la Cour et l’a retransféré, contre le gré de la Cour, au parquet près la Cour de cassation, en violation de la Constitution et de la loi organisant le fonctionnement de la Cour constitutionnelle. L’objectif étant de trouver à tout prix une juridiction capable de condamner Monsieur Matata. C’est cela l’État de droit », poursuit-il.

Matata Ponyo affirme également que jamais une institution ou une personnalité de haut rang n’a récusé publiquement la compétence de la Cour constitutionnelle à interpréter un article de la Constitution et regrette que le président du Sénat, Modeste Bahati Lukwebo, a soutenu publiquement que la Cour constitutionnelle a mal interprété l’article 164 de la Constitution : « L’opprobre a été ainsi jeté par le président du Sénat aux neuf juges de la Cour pour leur incapacité à interpréter un article de la Constitution », explique Matata Ponyo.

« Face au silence incompréhensible de la Cour constitutionnelle, la population se pose la question de savoir à qui elle doit croire quant au contenu exact de cet article. Aux neuf juges de la Cour ou au Président du Sénat, constitutionnaliste de circonstance ? » se questionne-t-il encore ajoutant que l’État de droit exige qu’en de telles circonstances, « la Cour constitutionnelle rompe son silence mythique et édifie davantage les citoyens, car elle est la seule institution compétente en la matière. »

« Les contrevérités distillées par le Président du Sénat sont de nature à semer la confusion au sein de l’opinion tant nationale qu’internationale. Cette attitude qui est constitutive de rébellion à l’égard de l’arrêt de la Cour, porte naturellement atteinte à la dignité des membres de la Cour que le législateur voudrait pourtant intangible à la lecture du serment que prêtent lesdits membres. C’est cela l’État de droit », signifie le sénateur Matata Ponyo.

Il estime que « l’on ne peut pas rechercher un État de droit et au même moment tolérer la méconnaissance publique des décisions de la Cour constitutionnelle par un citoyen, soit-il, chef d’une haute institution, pourtant tenu à l’obligation de réserve. »

« Ce mauvais précédent constitue un risque de dérapage très élevé pour le pays, car, les décisions de la Haute Cour deviennent contestables en fonction de la position que l’on occupe ! Bien plus, le prix à payer pour les générations futures est énorme parce que désormais, l’incertitude plane sur le caractère obligatoire des arrêts la Cour », ajoute le sénateur.

« Le silence constaté de toute part, surtout de la Cour constitutionnelle et de la Présidence de la république face à cette rébellion du Président du sénat est très inquiétant et remet en cause les perspectives d’un véritable État de droit. Une réaction appropriée s’impose pour rétablir la crédibilité entachée de cette institution quant aux décisions qu’elle a prises et qu’elle est appelée à prendre », insiste-t-il.

« Ne creuse-t-on pas la tombe à la démocratie et à l’Etat de droit avec de telles attitudes ? », s’interroge Matata Ponyo qui rappele que la Constitution est la loi suprême du pays : « C’est l’expression de la volonté du peuple tout entier. A ce titre, elle est au-dessus de tout le monde. Elle doit donc être observée et appliquée par tous dans sa totalité et non en partie, à tout moment et non quand on veut » explique-t-il.

« Si certaines autorités, à cause de leur position institutionnelle, peuvent se dire publiquement non concernées par la Constitution lorsqu’elles n’y trouvent pas d’intérêt et ne recourir à celle-ci que quand ça les intéresse, ce n’est plus la Constitution. Ça devient un livre ordinaire comme tous les autres qui ne valent que le prix de l’encre et du nombre des pages qui s’y trouvent. A terme, la Constitution perd sa crédibilité et sa puissance publique, comme on l’a vu par le passé au cours de la Deuxième République. Ça devient un instrument au service des plus forts qui ne représentent qu’une frange marginale de la population. Un outil en défaveur des plus faibles qui constituent la majorité du peuple », ajoute-t-il insistant sur le fait qu’il importe de veiller à son application sans faille, et cela pour consolider la fondation de la justice dans le pays.

« La justice élève les nations, dit-on. Elle constitue le socle des vieilles démocraties et des économies émergentes. Elle conditionne en réalité l’État de droit dont la RDC a besoin pour prétendre s’inscrire sur la trajectoire de l’émergence et du développement », conclut-il.




Job KAKULE

Job KAKULE - 08/01/2022 10:58 - Répondre 

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