
Elles sont fines, dorées ou argentées, et parfois discrètement ornées de perles.
Accrochées autour du bassin, des hanches ou même enroulées autour du tendon d’Achille, ces chaînettes sont devenues un phénomène de plus en plus visible chez de nombreuses jeunes filles, notamment dans l’Est de la RDC.
Pour mieux comprendre les motivations qui poussent à les porter, on a mené un petit sondage sur WhatsApp.
On a ainsi recueilli les avis de 25 jeunes filles, âgées de 19 à 29 ans, originaires principalement du Nord-Kivu, de l’Ituri et de la Tshopo.
Ce qui, au départ, semblait être une tendance anodine, révèle une pluralité de significations, d’influences et de perceptions sociales ou spirituelles.
Séduction assumée, imitation et pression sociales
Certaines des jeunes filles interrogées assument totalement leur geste.
« Je porte la chaînette parce que je trouve ça sexy. C’est un accessoire qui me rend sûre de moi. Et puis, on sait que ça attire les hommes », écrit Georgette, 24 ans, habitante de Bunia.
De son côté, Ramy, 22 ans, depuis Kisangani (Tshopo), complète : « Je les porte au niveau des hanches, mais parfois aussi sur le tendon, à la cheville. Ça fait stylé et ça attire l’œil. Je me sens mise en valeur. »
Pour d’autres, il s’agit simplement de suivre la tendance, souvent sans se poser de questions : « C’est une amie qui m’a initiée. J’ai vu ça dans les statuts de plusieurs filles, j’ai copié. Maintenant j’en ai même une fine autour de la cheville. Je ne sais pas trop ce que ça veut dire, mais c’est devenu à la mode », confie Fadila, 20 ans, vivant à Goma (Nord-Kivu).
Une autre répond anonymement : « TikTok nous inspire beaucoup. Dès qu’une influenceuse lance une nouvelle tendance, on la suit. »
Une acculturation silencieuse avec des implications spirituelle
Collette, 27 ans, depuis Butembo, s’interroge plus en profondeur : « Ces chaînes qu’on porte maintenant sur les hanches ou les tendons ne viennent pas de notre culture. C’est un copier-coller sans réflexion. On veut être vues, mais on oublie d’où on vient », estime-t-elle.
Un chercheur en occultisme, basé à Kisangani et contacté via Messenger, évoque des implications peu connues : « Le port de chaînettes sur les zones énergétiques comme le bassin, la cheville ou le tendon n’est pas anodin. Dans certaines traditions, cela symbolise l’enchaînement de l’âme, l’appel sexuel ou encore une canalisation d’énergies spirituelles. Les jeunes filles l’ignorent, mais ces bijoux peuvent ouvrir des accès spirituels involontaires », explique-t-il.
Du côté religieux, le ton est sans détour. Le pasteur Samuel K, réagit dans une vidéo via WhatsApp : « Ces chaînes sur les hanches et les chevilles ne sont pas de simples décorations. Elles marquent une sexualisation rampante de la femme, une perversion silencieuse. Le diable avance masqué », avance-t-il.
Entre esthétique, influence et perte de repères ; les parents s’inquiètent
Dans les échanges qu’on a eus après ce mini sondage, plusieurs parents ont exprimé leur désarroi vis-à-vis ce phénomène
Une mère de la cité frontalière de Kasindi-Lubiriha, en territoire de Beni, confie : « Ma fille avait une chaînette à la cheville. Quand je l’ai vue, j’ai cru que c’était un objet fétiche. Elle m’a ri au nez »
Un autre père de famille ajoute : « Ce n’est plus nous qui éduquons. Ce sont les réseaux sociaux. Et ces accessoires-là, c’est juste un signe parmi d’autres de ce qu’on est en train de perdre. »
Pour d’autres encore, ce phénomène soulève de profondes interrogations sur l’évolution des codes féminins, le rôle des réseaux sociaux dans la construction identitaire, et le vide laissé par le manque de repères moraux et éducatifs.
Il faut noter que tous les prénoms utilisés dans cet article sont fictifs.
Les jeunes filles ayant partagé leurs témoignages via WhatsApp n'ont pas souhaité être identifiées publiquement.
Leurs propos ont été repris avec leur consentement implicite, dans le respect de leur anonymat.
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