
Discret depuis la prise de Goma et Bukavu, le Général Sultani Makenga, chef militaire des rebelles souvent discret, s'est exprimé publiquement dans une interview accordée cette semaine au chercheur belge Alain Destexhe sur la Guerre en cours dans l'Est de la RDC.
Ce dernier a critiqué le président Félix Tshisekedi qu’il présente comme un bandit : « Il n'a pas l'amour du pays, c'est un bandit », a-t-il déclaré.
Pour la suite de la guerre, Sultani Makenga a fait savoir que ses hommes ne comptent pas marcher jusqu'à Kinshasa, sauf s'ils sont menacés : « Nous luttons pour notre survie. Il faut bien comprendre que nous avons pris les armes parce que nous étions menacés d'extermination. Nous n'allions pas nous laisser exterminer sans réagir », a-t-il déclaré expliquant notamment que le village de Nturo dans le Masisi a été brûlé « uniquement parce qu'il était peuplé principalement de Tutsi. »
« On doit dépasser cette idéologie ethnique de la haine et favoriser la réconciliation », a-t-il déclaré.
Interrogé sur le pourquoi de la prise de Goma et Bukavu, le Général Sultani Makenga a affirmé que c’est en réaction aux attaques des FARDC que ces deux chefs-lieux sont tombés entre leurs mains : « Ce n'était pas dans nos objectifs mais, depuis Goma, les FARDC et les autres forces pilonnaient nos positions et les populations civiles sous notre contrôle. Nous ne pouvions plus le tolérer. Puis, les FARDC et les forces burundaises se regroupaient à partir de Bukavu et recevaient des approvisionnements à partir de l'aéroport de Kavumu. Nous avons donc dû prendre Bukavu pour éliminer cette menace », a-t-il avancé indiquant que les FARDC continuent à les attaquer avec des drones à partir de Kisangani.
Une guerre pour la survie
« Nous avons une cause à défendre et nos militaires sont déterminés. En plus, nous n'avons pas d'autre option : c'est la victoire ou la disparition. Nos adversaires ne sont pas dans cette situation. Contrairement aux FARDC, nos militaires ne touchent pas de solde. Ils se battent par conviction et patriotisme », a poursuivi Sultani Makenga revenant sur sa victoire militaire face aux forces gouvernementales souvent bien supérieures en nombre et en moyens.
Au sujet du dialogue direct avec Kinshasa, annoncé pour le 18 mars prochain par la médiation Angolaise, le chef militaire du M23 a réitéré que la position de son mouvement qui veut négocier : « A ce stade, nous avons seulement pris connaissance de la position de l'Angola, mais nous n'avons encore rien entendu celle de Kinshasa », a-t-il fait savoir.
Notez que le M23 a clairement exigé des garanties avant tout dialogue direct avec le gouvernement congolais.
Un mouvement rebelle qui se veut respectueux des droits humains
Réagissant sur le sort réservé aux militaires des FARDC qui se sont réfugiés la MONUSCO, le Général Makenga a indiqué que seuls 1.200 militaires sur les 2.000 annoncés après leur défaite, ont été recensés et que les autres qui se sont cachés parmi la population, « constituent une source d'insécurité pour la ville. »
Sur le dossier d’enlèvement des malades des hôpitaux, il a réitéré qu’il s’agissait des militaires des FARDC qui se faisaient passer pour de faux malades ou des garde-malades : « On a trouvé 14 armes là-bas. Ce sont des membres du personnel de l'hôpital qui nous ont alertés sur cette situation. Nous avons arrêté ceux qui n'avaient pas à être à l'hôpital. Il y a dans tous les hôpitaux de la ville des blessés des FARDC et nous ne nous en prenons pas à eux », a-t-il signifié.
Pour rappel, le Général Sultani Makenga s'était déjà affiché publiquement lors d’une visite des militaires blessés et malades des FARDC internés à l’hôpital militaire du camp Katindo.
Il avait alors exprimé son intention de les prendre en charge et les réintégrer plus tard au sein du M23.
L’implication de la MONUSCO et des FDLR et le soutien du Rwanda
Interrogé sur le soutien du Rwanda au M23, dénoncé à maintes reprises par le gouvernement congolais et la communauté internationale ; Sultani Makenga a avancé que le régime de Kinshasa "cherche un bouc émissaire pour les problèmes qu'il a créés ou qu'il n'a pas résolus" : « Les Rwandais nous comprennent et ils essaient d'expliquer notre situation au monde. Ce sont nos voisins et nos frères et ils font face, comme nous, depuis longtemps à la menace des FDLR. Nous avons encore aussi une centaine de milliers de réfugiés dans des camps au Rwanda qui souhaitent rentrer chez eux », a-t-il déclaré affirmant que les FDLR sont partout dans les FARDC, "y compris dans la garde présidentielle."
« Ils ont été rééquipés et réarmés. Ils ne peuvent pas gagner la guerre contre nous, mais ils peuvent encore s'en prendre à des populations civiles dans notre zone qui est très vaste et où les villages sont espacés », a-t-il ajouté indiquant que ceux-ci ont tué il y a quelques jours 40 personnes dans le village de Kirumbu.
Sur le cas de la MONUSCO, le chef militaire du M23 a expliqué que cette dernière "a dévié de sa mission de maintien de la paix et devrait être neutre" : « Même si la MONUSCO a tiré sur nous, nous ne sommes pas animés d'un esprit de vengeance. Quand le combat est fini, il n'y a chez nous aucune haine des anciens adversaires », a-t-il déclaré.
Une urgence de la repise du cours normal de la vie
Pour ce qui est de la situation socioéconomique dans les zones sous contrôle notamment à Goma où les banques et l’aéroport ne sont toujours pas fonctionnels, Sultani Makenga a affirmé que le M23 est favorable à la repise : « C'est Kinshasa qui a fermé les banques. L'argent déposé dans les banques n'appartient pas à Tshisekedi, mais aux clients ! Il punit la population et continue la spoliation à distance », a-t-il signifié indiquant par ailleurs que les FARDC ont détruit et pillé la tour de contrôle de l’aéroport de Goma où ils ont laissé des postes de fortification et de nombreux véhicules sur les pistes qui peuvent être minées.
Dans le même temps, il a affirmé que le M23 n’est aucunement impliqué dans le trafic minier : « Nous ne nous mêlons ni de près ni de loin à l'exploitation qui est faite de façon artisanale par les populations locales à travers des coopératives. Les minerais sont achetés par des intermédiaires qui les vendent à des sociétés qui les exportent », a-t-il fait savoir indiquant que toutefois que depuis que son mouvement contrôle la frontière à Goma et à Bukavu, il perçoit des droits de douane sur les marchandises.
Enfin, le chef militaire du M23 a assuré que son mouvement est de plus en plus ouvert et multiethnique qui veut construire une nation et un Etat qui dépassent ces questions ethniques qui handicapent le : « Nous sommes pour un Congo uni, décentralisé et fédéral qui s'attaque avec urgence aux questions de développement et de gouvernance. Vous avez vu comment vivent les Congolais sous Tshisekedi ? Qu'est-ce qu'il a fait pour eux ? », a-t-il conclu.
1 Commentaire
Joseph Seven - 14/03/2025 16:49 - Répondre
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