Par Claudel Lubaya

Ce 30 juin 2025, notre pays commémore le 65ème anniversaire de son indépendance.

Loin de toute célébration d’un progrès illusoire, nous devons unanimement faire face à une réalité alarmante : 65 ans après le sacrifice de nos martyrs du 4 janvier 1959 et l’engagement des pionniers de notre souveraineté, la dépendance du Congo s'est paradoxalement accentuée.

Notre Nation semble prise au piège d’une classe politique qui l’a menée à une dépendance plus profonde encore qu’avant son accession à l’indépendance.

Cette dernière n'a en effet pas engendré la démocratie, le progrès social, ni un véritable État de droit.

Tous les secteurs stratégiques de notre économie sont aujourd’hui aux mains des firmes étrangères. Même l’acquisition d’armes et d’avions de guerre se fait par l’intermédiaire des commissionnaires étrangers, souvent sur fond des commissions illicites.

Cette dépendance s’étend jusqu’à nos symboles nationaux : les documents d’identité (passeport, carte d'électeur, machine à voter, permis de conduire, plaque minéralogique, etc) sont imprimés par des entreprises étrangères.

L’ampleur de la dépendance est telle que le risque de voir notre pays sombrer est de plus en plus palpable et pourtant, personne ne semble en prendre conscience.

Un bilan amer après six décennies et demie Depuis 1960, notre pays a été secoué par une succession ininterrompue des crises politiques.

Elles ont été traitées de manière superficielle sans jamais aborder les causes profondes, laissant la question de la légitimité du pouvoir au cœur des débats, entravant ainsi tout progrès social.

Le cycle des crises persiste sans que les dirigeants en tire les leçons. La RDC stagne, trahissant ainsi le destin de grandeur promis par les pères de l'indépendance.

Au 30 juin 2025, sur le plan sécuritaire, le gouvernement a perdu le contrôle des pans entiers du territoire national.

Même dans la capitale nationale, des zones de non droit ont été érigées par des kuluna, tandis que dans l’arrière-pays, Kinshasa n’assume plus ses missions régaliennes, plus particulièrement dans les zones où il y a des hostilités armées.

Malgré cette réalité, le gouvernement semble dépourvu de solution et se focalise désormais sur différentes initiatives de paix, juxtaposées les unes sur les autres, dans une certaine cacophonie.

Si les initiatives visant à faire cesser les hostilités et à soulager les populations qui subissent les affres de la guerre se multiplient, l’aspiration légitime à la paix ne peut servir de prétexte au bradage des ressources du pays ni au transfert de notre souveraineté à des États tiers. Ce n’est pas pour ça que Lumumba et ses compagnons ont payé le prix le plus fort.

La gouvernance actuelle a institué un formalisme d’externalisation et de sous-traitance de toutes les prérogatives régaliennes de l’État à telle enseigne que le président de la République, censé être garant du bon fonctionnement des institutions, s’en trouve réduit à un infime rôle protocolaire de "gouverneur général" des puissances étrangères auxquelles il transfère allègrement ses prérogatives constitutionnelles en matière de défense et de sécurité. C'est tout simplement de la haute trahison.

La récente visite du chef d’état-major de l’armée ougandaise est l’illustration authentique de la conception de la notion de souveraineté dans l’entendement de Félix Tshisekedi.

Lors de cette visite, ce chef d’une armée étrangère en parade dans la capitale, dont le pays est souvent cité comme agresseur, a obtenu cash des autorités congolaises le pouvoir d’administrer militairement des pans entiers de notre territoire en provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri et de sécuriser les travaux de réhabilitation de la route Kasindi - Beni – Butembo ; ce qui équivaut à un transfert en bonne et due forme de notre souveraineté.

Visiblement heureux et honorés de la visite, le chef de l’état congolais et ses hauts gradés de l'armée ont remis à leur hôte les clés et la décision en matière de défense et sécurité dans la partie lui confiée.

Leur apparente satisfaction face à cette résolution laisse perplexe au point d’interroger sur leur pleine conscience de la gravité de l’acte qu’ils venaient de poser.

A cela s’ajoute le récent accord qualifié par certains de paix et par d’autres de commercial signé à Washington, entre les gouvernements congolais et rwandais.

Exhibé à grand renfort médiatique, il a été faussement qualifié d’historique alors que l’on sait qu’il n’est pas le premier du genre entre les deux pays.

Le gouvernement aurait tort de chercher à l’imposer à la Nation comme une panacée. Ce serait une erreur, d’autant plus que ce n’est ni le premier, ni probablement le dernier, avec le Rwanda.

Par le passé, de nombreux traités ont déjà été conclus avec ce pays (Lusaka 1999, Pretoria 2002, Nairobi 2007, Addis-Abeba 2013, Luanda 2022, etc.). Aucun n’a véritablement abouti.

L’accord de Washington fait l’objet de toute sorte d’interprétations et de spéculations. Certains y voient une capitulation, d’autres un bradage de nos ressources au profit du Rwanda et des USA, d’autres encore une humiliation, une violation flagrante de la Constitution et par conséquent, un acte de haute trahison.

Quoi que l’on dise, ces postures sont légitimes, quel que soit le camp. Et pour cause : les parcs nationaux à cogérer avec le Rwanda, tout comme les centrales hydroélectriques, les chaines d’approvisionnement en minerais, les ressources du Lac Kivu, les minerais stratégiques et autres ressources naturelles concernés par cet accord ne sont la propriété du gouvernement ni d’une famille politique ou biologique.

Loin de là. Il s’agit de notre patrimoine national, héritage commun à toute la nation et garantie d’avenir pour la postérité.

Personne, fût-il chef de l’État ou membre du gouvernement, ne saurait sous peine de haute trahison et quelles qu’en soient les raisons, s’autoriser d’hypothéquer notre avenir commun par des engagements et des arrangements aussi controversés.

Même au sein de la majorité présidentielle, le malaise couve, les murmures sont silencieux. La Nation est en droit d’exiger des explications sincères et détaillées.

Dans une démarche responsable dénuée d’invectives et de triomphalisme, le gouvernement est astreint au devoir de transparence.

Sortir de la dépendance

Ces 65 ans de dépendance doivent être le point de départ d’une profonde introspection.

Il est temps de redéfinir notre conception de la souveraineté, d'incarner un patriotisme authentique et de construire ensemble un État véritablement indépendant et prospère.

Le défi est immense : il s’agit de corriger le schéma de gouvernance actuel, de rendre l'action publique lisible et de répondre aux attentes légitimes de la population.

Dans 35 ans, la RDC célébrera le centenaire de son indépendance.

Le Peuple et ses dirigeants doivent dès maintenant faire des choix déterminants pour que ce jalon historique marque la concrétisation de ce que nous n’avons pas su accomplir en 65 ans.

Par Claudel Lubaya




Samuel ABIBA

Samuel ABIBA - 30/06/2025 18:09 - Répondre 

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