Monsieur le Président

Permettez-moi d'abord de vous féliciter pour votre prochain mandat à la tête de la République Démocratique du Congo.

Je ne vais revenir sur les ratées du processus électoral et sur ses conséquences sur la légitimité du pouvoir. 

 Comme l'a dit quelqu’un : le 20 est tiré. Il faut le boire.

Aujourd'hui, il faut avancer. La question est de savoir comment avancer. Il faut tirer les leçons positives du passer et éviter les erreurs.

Monsieur le Président,

L'heure est maintenant au travail pas à la fête, aux célébrations.

Il n'y a plus de blocage, plus de bouc émissaire. Plus de FCC, plus de *crise de légitimité* (au moins en apparence).

Il n'y a plus de bénéfice du doute. Plus de *je n'étais pas au courant, je ne suis pas informé*. Après 5 ans au pouvoir vous connaissez désormais le contexte socioéconomique et sécuritaire. Vous connaissez les acteurs et leurs jeux. 

"Je ne savais pas" n'est plus une excuse.

Le régime précédent, n'a rien fait, on a trouvé le pays par terre. Ça non plus ce n'est plus une excuse. Vous avez demandé un autre mandat pour corriger les erreurs de vos prédécesseurs. Non pas pour utiliser leurs ratées comme excuses.

Et puis, Monsieur le Président, le régime précédent c'est désormais le vôtre, celui de l'Union Sacrée de la Nation. 

Ces derniers 5ans seront désormais la référence ultime au passé lorsqu'on évaluera vos actions au courant de ce 2e mandat. 

Monsieur le Président de la République, le Je suis mal entouré n'est plus aussi une excuse.

Entourez-vous dès maintenant, non pas d'un club de copains pauvres prêts à brader le pays pour s'enrichir mais entourez-vous de vrais spécialistes des questions sociales, économiques, financières, sécuritaires...de notre pays. Vous n'avez plus besoin de vous compromettre dans des alliances avec ceux qui ont détruit ce pays. Vous ne devez rien à personne.

 

Entourez vous des personnes qui au delà de leur expertise dispose en plus d'un minimum d'éthique politique, d'un certain sens du bien commun et qui peuvent travailler avec abnégation pour l'intérêt de tous les congolais.

Monsieur le Président de la République, vous avez le choix, entre vous enraciner dans la médiocrité ou viser avant tout l'excellence.

Quoi qu'il en soit, l'entourage et les alliances avec les plates formes politiques n'est plus une excuse.

Il n'y a plus rien qui empêche l'Union Sacrée de la Nation de faire mieux qu'hier.

Monsieur le Président, il faut aussi revisiter les acquis. Je ne parle pas de les consolider. Parce que les acquis on n’en a pas vraiment. Il y a plutôt des initiatives qui n'ont pas abouti et dont les résultats sont peu palpables. Je parle de revisiter, de renforcer ces initiatives pour en faire de véritables acquis. (maternité et éducation gratuites, finaliser la mise en œuvre du programme de 145T, projet Tshilejelu, la lutte contre l'impunité, la détribalisation des nominations, la préférence pour les compétences en lieu et place du régionalisation et du népotisme).

Bien plus, il est temps de construire une armée forte, disciplinée et dissuasive. En lieu et place d'une armée dirigée par des officiers efféminés, multimillionnaires plus préoccupés par leur mafia mais incapables de reprendre entre les mains des rebelles un seul centimètre du territoire national occupé et exploité par les forces étrangères ou à la solde des pays voisins.

On est désormais loin des discours de campagne. Il est temps aujourd'hui de déconstruire le mythe de Wazalendo et de construire une véritable réserve Armée de la Défense. Ce qui suppose de former les Wazalendo dûment démobilisés, sur les B.A.BA de l'armée (techniques de guerre, maniement des armes, endurance physique au front, la discipline militaire, Droit international humanitaire, idéologie etc). On ne peut pas gagner une guerre avec des groupes armés composés des éléments qui se sont improvisés défenseurs du peuple. Avant de compter sur eux pour défendre l'intégrité du territoire national, il faut les former. 

Il est temps de revisiter nos efforts diplomatiques, ce qui suppose de vous entourer des personnes qui comprennent les enjeux de la sous région, de la région ainsi que les enjeux internationaux... Les accords ne se signent pas à la légère. Parce qu'ils engagent durablement l'Etat. Il faut pour cela des études préalables qui peuvent durer des mois, voire des années. 

Les réunions internationales et régionales ne sont pas des occasions de donner accès aux frais de mission à notre entourage. Ces réunions ne sont pas des opportunités de tourisme. Ce ne sont pas des occasions de faire des selfies ou de faire des amplettes. C'est avant tout des moments d'intenses reflexions sur les retombées positives de leurs conclusions sur la RDC et sur les congolais. 

Ceux qui ne sont pas capables de s'élever à ce niveau de réflexion ne devraient pas prendre part à ces réunions. Parce qu'ils font perdre au pays son argent et surtout des belles opportunités.

Il est de temps de construire les routes, les hôpitaux, les écoles, le logement décent, de faciliter à la population l'accès à l'eau potable, à l'électricité, la sécurité alimentaire...

Il est temps de prendre en compte le contexte de chaque province et d'agir en conséquence: route et insécurité au Sud Kivu, conflit armé au Nord Kivu et à Kwamouth. 

Il est temps de renforcer l'unité nationale notamment au Kasaï, au Katanga, au Kivu et en Ituri. 

Il est temps de créer dans le chef des congolais, ce sentiment d'appartenance à une même nation. (L'exemple viendra d'en haut si vous même Monsieur le Président vous vous dépassez et envisagez la diversité socio culturelle et intellectuelle de la RDC comme une richesse. La politique de mutation des cadres de l'administration et des entreprises publiques permettrait à tous de se sentir chez eux partout en RDC. L'exemple et l'impulsion viendront d'en haut. 

Pour construire cette unité, il vous faudra relier les provinces, désenclaver le Sankuru et plein d'autres secteurs/chefferies oubliés pour permettre les rencontres interculturelles, les échanges économiques et une véritable intégration interne etc. 

Il est temps aussi Monsieur le Président de visiter toutes les provinces, pour vous imprégner de leurs potentiels économiques et vous permettre de focaliser sur les investisseurs congolais plutôt que sur les étrangers. Les Congolais comptent des multimillionnaires dont les affaires, si elles sont protégées par l'Etat, pourraient contribuer au développement du pays. Inciter ces congolais à créer des usines, à passer de l'état des vendeurs à celui de véritables commerçants capables de transformer et de distribuer en interne comme à l'externe. Leurs investissements donneront un sens à nos adhésions dans différents regroupements régionaux où nous apparaissons plus comme des consommateurs, un marché pour l'écoulement des produits étrangers.

Monsieur le Président, il est temps d'améliorer la gouvernance politique et administrative de la RDC. Temps de faire de la décentralisation une opportunité de développer le pays. Ayez un œil sur les députés provinciaux corrompus convaincus que les budgets des provinces sont constitués de leur argent de poche. Mais leur laisser aussi la lattitude de sanctionner les gouverneurs incompétents, inefficaces. On souhaiterait moins d'interférences du ministère de l'intérieur dans la gestion des provinces et d'autres entités décentralisées.

Bref, il est temps de rattraper toutes les ratées des 5 premières années.

Ce qui demande de vous concentrer sur les solutions aux problèmes du pays que de chercher avant tout à enrichir quelques frères, amis, alliés et connaissances. 

Ce qui exige aussi des sacrifices. Moins de fêtes, de champagne et du caviar. Plus de travail. 

Ce qui suppose de réduire de façon drastique le train de vie des institutions. De toutes les institutions.

On peut réduire les salaires scandaleux des parlementaires et des ministres. Parce que leur mission n'est pas de s'occuper des problèmes sociaux de leurs électeurs. Le ministère des affaires sociales devraient s'occuper de cela. Pas les députés Monsieur le Président. Ces immenses énormes de fonctionnement et liés aux rémunérations des politiciens ne vous permettront pas d'investir au pays.

Ces 5 prochaines années détermineront l'avenir du pays. La RDC sombrera définitivement et succombera aux démons internes et externes de la balkanisation. 

Soit au cours de ces 5 prochaines années, les congolais jetteront les bases de la reconstruire de leur pays. 

Toute erreur dans la gouvernance politique, économique et sécuritaire serait fatale

Il n'y a plus désormais d'excuses. Il n'y a plus d'excuses acceptables aux résultats approximatifs.

Je réitère mes félicitations Monsieur le Président et vous souhaite un mandat plus fructueux pour le plus grand bien du Congo et des congolais.

Par Cisara BIZ.